« Lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël »

Le 2 février, l’Eglise nous invite à fêter la présentation du Seigneur au Temple. Connue de manière plus populaire sous le nom de Chandeleur ou encore sous l’appellation de fête de la purification, cette fête, célébrée quarante jours après la Nativité, vient conclure les solennités de l’incarnation. Elle nous rappelle que, quarante jours après sa naissance, Jésus, selon la loi de Moïse, est présenté au temple par Marie et Joseph et reçoit de la part de Syméon le titre de « lumière pour éclairer les nations ».

 

Cette célébration, comparée à une eucharistie ordinaire, est précédée de rites spécifiques. Après l’antienne d’ouverture qui évoque la venue du Seigneur qui vient nous illuminer, la monition souligne le caractère d'anamnèse de cette marche vers la maison de Dieu : évocation de la rencontre de Jésus et de Syméon, elle conduit à la rencontre de l'assemblée des chrétiens avec son Seigneur dans la fraction du pain, en attendant l'ultime rencontre dans la gloire. Suit alors la bénédiction des cierges en utilisant l’une des deux prières mentionnées dans le missel, toutes deux mettant l’accent d’une part sur le Christ désigné lumière des nations ou lumière véritable et d’autre part, sur notre pèlerinage pour parvenir à la lumière éternelle, à la splendeur de la gloire du Seigneur. S’engage alors la procession, accompagnée du cantique que Syméon avait chanté lorsqu’il avait rencontré Jésus au temple puis la messe se déroule comme d’ordinaire.

 

Afin d’entrer dans l’intelligence de ce qui est célébré en ce jour, observons ce que mettent en lumière les pièces euchologiques :

 

- L’antienne d’ouverture souligne que ceux qui ont rencontré le Seigneur chantent son amour et sa louange au milieu de son temple

- La collecte joue sur le parallélisme suivant : tout comme le Christ a été présenté au Père pour la purification, nous demandons la grâce d’être purifiés pour pouvoir nous aussi être présentés devant lui.

- La prière sur les offrandes précise qu’avec nos dons, aussi pauvres soient-ils, nous présentons le sacrifice de l’Agneau.

- La préface rappelle d’abord les deux titres de Jésus, inspirés à Syméon par l’Esprit Saint, à savoir gloire d’Israël et lumière des nations, puis souligne notre désir d’aller dans la joie à la rencontre du Sauveur.

- L’oraison post-communion constitue une demande pour nous de bénéficier de la grâce autrefois accordée à Syméon : obtenir la vie éternelle en allant à la rencontre du Christ.

 

Trois mystères du Christ semblent ainsi à contempler au cœur de cette fête :

 

1. Le Christ est le Dieu qui se révèle et qui vient à la rencontre des hommes. Lors de cette présentation au temple, Jésus vient en effet rencontrer son peuple représenté par Syméon et Anne, mais ces derniers, personnes âgés, viennent aussi rencontrer deux jeunes, Joseph et Marie, avec Jésus au centre. « C’est Lui [Jésus] qui vient à nous, conduit par Marie et Joseph, et c’est nous qui allons vers Lui, guidés par le Saint-Esprit. Mais au centre, il y a Lui. C’est Lui qui anime tout, Lui qui nous attire au Temple, à l’Église, où nous pouvons le rencontrer, le reconnaître, l’accueillir, l’embrasser. »[1] Aujourd’hui encore, Jésus vient à notre rencontre mais il attend que nous aussi, nous fassions cette démarche d’aller à sa rencontre. Cette révélation de Dieu qui vient à la rencontre des hommes nécessite donc une réponse de leur part.

 

2. Le Christ est la lumière des nations. Ce mystère du Christ honoré par la chandeleur se présente comme une confirmation de ce qui a déjà été célébré quarante jours plus tôt à la Nativité et si merveilleusement bien exposé par Isaïe : « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ; et sur les habitants du pays de l’ombre, une lumière a resplendi. » (Is 9, 1). Jésus lui-même s’attribuera ce titre lorsqu’il déclarera : « Moi, je suis la lumière du monde. Celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, il aura la lumière de la vie. » (Jn 8, 12). Mais il nous qualifiera aussi de la sorte en proclamant : « Vous êtes la lumière du monde. » (Mt 5, 14). Dès lors, une double mission nous incombe : accueillir dans nos vies le Christ comme la lumière du monde mais être aussi porteurs de cette lumière pour le monde. Tel est le sens du cierge que nous recevons au jour de notre baptême (et que nous retrouvons en cette fête) : « Recevez la lumière du Christ. C’est à vous, parents, parrains et marraines, que cette lumière est confiée. Veillez à l’entretenir : que ces enfants illuminés par le Christ, avancent dans la vie en enfants de lumière et demeurent fidèles à la foi de leur baptême. Ainsi, quand le Seigneur viendra, ils pourront aller à sa rencontre dans son Royaume, avec tous les saints du ciel. ».

 

3. Jésus est tout offert à son Père, offrande qui ira jusqu’à la mort sur la croix. Pour cette fête rituelle, Marie et Joseph offrent certes, selon les prescriptions de la loi, uniquement un couple de tourterelles en raison de leur pauvreté mais leur offrande au final est bien plus grande que cela : c’est Jésus lui-même qu’ils offrent, autrement dit l’Agneau par excellence, celui qui librement donnera sa vie par amour en mourant sur la croix. Ce sacrifice, Syméon, sous l’inspiration de l’Esprit Saint, l’annoncera de manière prophétique à Marie : « Voici que cet enfant provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de contradiction – et toi, ton âme sera traversée d’un glaive – : ainsi seront dévoilées les pensées qui viennent du cœur d’un grand nombre. ». A la suite de Jésus, nous avons-nous aussi à nous offrir au Père, à l’exemple des consacrés dont la fête coïncide précisément avec cette présentation de Jésus au temple.

 

Au soir de notre vie, quand nous aurons à vivre la rencontre, le face-à-face avec Dieu pour parvenir à la lumière qui ne s’éteint pas, puissions-nous nous offrir au Seigneur en faisant nôtre les mots de Syméon : « Maintenant, ô Maître souverain, Tu peux laisser Ton serviteur s’en aller en paix, selon Ta parole. Car mes yeux ont vu le salut que Tu préparais à la face des peuples : lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël. »

 

P. Stéphane CAILLIAUX

Article paru dans la revue Préludes

[1] Pape François, Homélie pour la fête de la présentation du Seigneur, 2 février 2014.